Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Technopolis
Technopolis
Publicité
Derniers commentaires
Archives
3 mars 2007

Episode 05

Il se posta devant la porte automatique et entra sa carte pour l’ouvrir. Après avoir produit un souffle semblable à un soupir, le panneau glissa dans le mur, lui permettant de rentrer. Il comptait se rendre dans sa chambre quand sa mère lui barra le passage. Elle surgit devant lui, le faisant violemment sursauter et commença à l’entraîner vers le salon.
« Mon chéri, tu vas voir, je t’ai concocté une surprise merveilleuse, je suis sûre que tu vas rester sans voix ! Je suis impatiente de te montrer ça, mais avant, il faut que je vérifie si tu es bien…Oh mon chéri ! Tu as une tête épouvantable ! Où es-tu allé traîner, encore ?  »
Elle soupira et commença à lui arranger les cheveux et à lui replacer sa chemise correctement. A 55 ans, Lauren Wadeker était encore une très belle femme, avec ses yeux vert émeraude qui valaient l’admiration de la plupart des hommes de son âge et des cheveux d’ébène parmi lesquels apparaissaient quelques cheveux blancs. Mais malgré son succès auprès de la gent masculine, elle avait toujours refusé de se remarier, restant fidèle à la mémoire de son époux, mort en guerre. Ethan n’avait pas beaucoup de souvenirs de son père et ne savait même plus quelle tête il avait… Il ressemblait tellement à sa mère que s’il eut appris qu’il n’avait pas eu de père, ça ne l’aurait presque pas surpris.
Quand elle eut enfin fini de le rhabiller, elle le traîna vers le salon où il découvrit Neve Woodart, sa chère fiancée, en grande tenue blanche : sa robe de mariée. Il resta sur le pas de la porte, bouche bée, admirant la jeune femme : ses longs cheveux bruns tirant sur le roux tombaient sur ses épaules, soulignant sa peau diaphane, tandis que son visage trahissait sa joie. Ses yeux marron pétillaient, ses lèvres joliment ourlées dessinaient un sourire qui ne paraissait pas feint. En effet, Ethan était un des meilleurs partis de la ville, il y avait de quoi se réjouir. Il devait admettre qu’elle était très belle, même si quelques kilos en plus ne lui auraient pas fait de mal, mais il ne l’aimait pas, c’était ainsi. Ce mariage était arrangé de toute pièce car les membres de l’élite ne devaient se marier qu’entre eux.
« Mon Dieu ! s’exclama Lauren, en prenant la future mariée dans ses bras. N’est-elle pas ravissante ? Neve, ma chérie, vous êtes tout simplement somptueuse ! Qu’est ce que tu en penses, Ethan ?
- C’est…tu es très belle, Neve.
- Oh, ne reste pas dans ton coin, viens donc voir la robe de plus près ! C’est Neve elle-même qui l’a dessinée, elle est vraiment…je ne trouve pas mes mots pour le dire. Oh, mes chéris ! Ca va être magnifique ! Je suis si excitée ! Ethan, il faut commander ton smoking !
- Maman, on ne se marie que dans quatre mois, on a le temps.
- Oh, Ethan, tu me désespères ! Si on t’écoutait, on ferait toujours tout au dernier moment. Bon, je vous laisse tous les deux, en amoureux. Vous devez en avoir des choses à vous dire. »
Elle leur fit un sourire plein de sous-entendu puis s’éclipsa, laissant les deux jeunes gens seuls. Neve se planta devant le miroir et s’examina sous toutes les coutures, d’un air suffisant, C’était précisément la raison pour laquelle il ne l’aimait pas. Elle était à ce point superficielle qu’elle se réjouissait d’épouser un homme qu’elle n’aimait pas, simplement parce qu’il faisait partie de l’élite. Par ailleurs, elle n’avait pas beaucoup de conversation, en dehors des bals mondains et des rumeurs sur les uns et les autres.
« Il faut célébrer nos fiançailles, déclara-t-elle, soudain.
- Hein ?
- Nos fiançailles, répéta-t-elle, excédée. Il faut faire une grande fête et inviter tous les gens en vue, comme ça, toute la ville ne parlera plus que de notre futur mariage…oh, je vois ça d’ici. Le colonel Woodart, héros de guerre et Mme Wadeker, veuve du grand général Wadeker ont décidé d’unir leurs enfants, pour le meilleur et pour le pire. Hou !  »
Elle poussa un petit gloussement qui voulait certainement dire qu’elle était ravie. Il voulut sortir de la pièce pour éviter ses délires pharaoniques, mais il s’y prit trop tard : elle fonça droit sur lui et se mit à énumérer les gens qui devaient être présents.
« Il faudra inviter les Adams, les Goldberg, les Green, Robertson…oh, tu sais qui il faut à tout prix inviter ?
- Dieu ?
- Soit un peu sérieux ! Les Geller ! C’est une des familles les plus importantes de la ville et ils ont un petit garçon de neuf ans !
- Super, on va pouvoir jouer aux petits soldats.
- Mais non ! Il nous faut une fille ! Si j’accouche dans un an, ils n’auront que dix ans de différence, c’est jouable…il faut que notre fille épouse Oliver Antelwort Geller !
- Quelle fille ? On n’est pas mariés et tu n’es même pas encore enceinte ! Redescend un peu sur terre, Neve.
- Oh, bon sang ! Tu sais que si tu n’étais pas le fils de Wadeker, je ne t’aurais jamais épousé !
- Ca tombe bien, parce que si j’avais le choix, je ne t’aurais jamais voulue. »
Elle poussa un grognement de colère et repartit à son miroir : elle préférait sans doute se pâmer plutôt que discuter avec son futur époux qu’elle haïssait probablement déjà. Il soupira et sortit sur le balcon pour prendre l’air. S’il n’y avait pas eu sa mère, il aurait refusé cette union, mais elle y tenait tellement.. Il ne voulait surtout pas la contrarier, il l’aimait trop.
Il entendit un bruit près de lui et tourna vivement la tête : un simple passant qui poursuivait sa route sans faire attention à lui. Il fut légèrement désappointé : il auaait souhaité se retrouver nez à nez avec sa voleuse, parce qu’il était quasiment sûr qu’elle n’était pas une exclue. Comment connaissait-elle son nom ? Pourquoi tous ces malfrats obéissaient aveuglément à cette fille ? Et pourquoi pensait-il encore à elle ? Il ne la reverrait probablement jamais et même s’il la retrouvait, que lui dirait-il ?
« Ca vous plairait de dîner avec moi ? J’aimerais bien savoir qui vous êtes. »
Elle éclaterait probablement de rire et lui volerait son passe . Il entendit Neve pianoter sur le robot-esthéticien, sans doute pour lui demander de la maquiller ou de la coiffer. Il soupira : il allait devoir passer sa vie avec la femme la plus gonflante de la planète, quel bonheur ! C’était peut-être pour ça qu’il repensait à l’autre femme, parce qu’elle était libre et qu’il l’enviait. Peut-être que si la guerre n’avait pas eu lieu, il aurait pu épouser la femme de son choix et aurait pu éviter les soirs de désespoir à l’idée de se marier avec une idiote qui n’avait aucune culture et aucun centre d’intérêt digne de ce nom. De toute façon, cette société n’était pas faite pour se cultiver : les enfants allaient à l’école pendant quatre ans pour apprendre à lire et à se servir des machines et après, ils étaient lâchés dans la Nature, sans avoir le goût de la lecture. De toute façon, pour ceux qui en auraient eu l’envie, ils auraient vite été découragés par les horaires impossibles de la bibliothèque municipale…A présent, ils pensaient que seule la télé pouvait cultiver et ils s’abêtissaient à regarder des films dans lesquels jouaient des cyborg plus vrais que nature ; mais au fond, il s’en était contenté jusque là parce qu’il n’avait pas vraiment envie de se battre pour que ça change. Les gens ne lisaient plus, et alors ? Que pouvait-il y changer, lui ? La société était ainsi faite et elle faisait plus d’heureux que toutes celles qui l’ont précédée…il fallait être réaliste : il y aurait toujours des exclus mais, au moins, à Technopolis, ils étaient réduits au minimum.

Premier Episode / Episode Précédent/ Episode suivant

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité